• Baby Hurricane (39)

     

     

    Jeff revêtit un vieux treillis qui pendait à un crochet, et enfila un bonnet de laine. Infatigable, Lola qui apparemment n’avait pas dormi une minute, se détendait encore les bras. Ce qui une nouvelle fois gonflait sa poitrine. Alex remarqua à peine la véritable artillerie que Jeff tirait d'un sac de toile. En plus du fusil de chasse à canons sciés, il emportait la grenade et un pistolet mitrailleur du genre tchèque.

    - Tu m’as l’air tout pâle.. Pense à te détendre un peu, on file d’ici l’aube;. Lui fit ce dernier, le dévisageant.

    – Euh.. C’est déjà l’aube.. Je crois bien.. Marmonna Alex.

    – Ah bon !.. J’avais pas fait attention;.

    La porte venait seulement de claquer, le laissant se fondre dans le gris du jour naissant, que Lola effectuait un volte face comme si elle démarrait un cent mètres. Elle se mit rageusement à fouiller dans tous les placards de la maison avec un objectif difficile à cerner. Alex la suivait de loin d’un couloir à l’autre sans quitter ses cuisses des yeux, les examinant qui gonflaient quand elle s’accroupissait. Elle disposait encore d’une sacrée énergie et vidait sans ménagement les recoins bourrés d’objets insolites. Dans son sillage Alex enjambait les reliques d’une vie entière avec amertume et curiosité. Puis il se souvint de son envie de prendre une douche. Soupçonnant qu’il ne devait pas sentir la rose depuis son dernier décrassage. Il s’en alla faire couler un bain et s’y plongea jusqu’au cou. Sans pouvoir oublier mentalement un dentier complet trônant sur une tablette. Après quoi au lavabo il lava ses sous vêtements qu’il mit à sécher contre un radiateur. D’un coup il fixa son reflet dans le miroir et plus spécialement ses cheveux rouges qui pendaient encore tout humides. Avec une barbe de plusieurs jours à laquelle il avait fini par s’habituer. Il s’empara des affaires du vieux et entreprit de se raser. Calmement, ne s’interrompant que quand il entendit Lola s’écrier dans le couloir.

    – Ouaahh.. Enfin… Je l’ai trouvé Bon Dieu celui-là..

    Ce qui l’amena à se hâter, enfilant un peignoir de coton en attendant que ses vêtements soient secs. Il la retrouva dans le séjour portant dans ses bras un incroyable pick-up recouvert de tissu écossais bleu et vert. Elle était à la recherche d'une prise électrique. Ce fait le déconcerta plus que tous les autres.

    – C’est un vrai musée cet endroit;. Il a du se payer de bons moments le papé dans sa jeunesse, dommage qu’il n’ait pas tout saisi des temps modernes.. M’enfin, il a pas à m’en vouloir de là où il se cache, j’y étais pour rien dans ses ennuis..

    Il calma en s’humectant les lèvres la culpabilité, tout en respirant plus fort quand la voix de Freddy monta dans la pièce. Il connaissait par cœur le morceau.. Baby Hurricane, un des grands classiques de Freddy, un de ses préférés aussi.

    Devant lui Lola chaloupait en se tenant le haut des hanches, et à petits pas se rapprochait du fauteuil dans lequel il venait de s’effondrer. La chanson était un boogie, un de ces trucs qu’on oublie jamais de passer dans les mariages. Il fixait Lola qui avait lâché ses hanches pour joindre les bras au-dessus de la tête. N’osant se livrer au moindre pronostic sur ce qui allait suivre. Mais elle se révéla autrement plus imprévisible que sa piètre imagination. Cessant toute activité, comme interdite.

    – Moi je sais ce qu’il te faut.. J’ai appris la coiffure, je te l’ai pas dis ?..

    Elle employait un ton familier qui le troublait. Au point qu’il ne sut lui répondre.

    – Attend une minute;. Bouge pas de là.

    Elle laissa jouer le trente trois tours et fila vers la salle de bain d’où elle ressortit avec un peigne et des ciseaux.

    – Bouge pas et reste bien assis.. Et surtout laisse moi faire.. On voit toutes tes racines maintenant, c’est dégueulasse..

    Elle entreprit de lui couper les cheveux rouges. Minutieusement, sans un mot supplémentaire, le frôlant de sa peau blanche et chaude, lui caressant la tête et la nuque, les épaules et le torse. Collant le haut de ses cuisses au niveau de ses épaules. Se déhanchant sur la musique dans une danse inédite.

    – Ca doit être une forme de distorsion du temps.. En tout cas elle devrait faire breveter le procédé.. Et si je devais en plus mourir dans moins d’une heure, je pourrais me dire que c'est pas d'ennui.. De toute façon il vaut mieux mourir d’un seul coup et pour de bon que mille fois de trouille et de honte.. Le Vieux Avait Raison Là Dessus.. Un de ces jours je boirais un coup à sa santé.. Rien que pour ça.. 

     

     

     


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