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    Puis il se repassa de vieux souvenirs. Des réveils blêmes semblables à celui-ci, il aurait pu en retrouver des centaines dans sa mémoire. Souvent des filles les accompagnaient, aux jupes froissées et des cernes sous les yeux, qu’on s’empressait d’oublier avec le dernier café avalé. Il se souvenait aussi qu’elles étaient rarement formidables, en général des groupies bas de gamme ramassées dans les fins de soirées. On les retrouvait au réveil avec des rires nerveux, et c’était le moment pour lire les lignes de la main ou raconter des anecdotes sur le grand Freddy. Elles en raffolaient de celles-ci, ce qui permettait de meubler l’oisiveté sans se répandre en promesses. Après quoi on remontait dans les bus ou l’avion, parce qu’avec Freddy il était facile de s’imaginer millionnaire pour la vie.

     

    Dans le snack verdâtre le silence s’installait autour de la table de métal et ses banquettes raccommodées. Alex ne voyait aucun intérêt à précipiter les évènements. Il aurait voulu que tout se termine en douceur. Mais Nico ne voulait pas le laisser en paix.

     

    -    on claque pas la porte d’une histoire pareille, avec quelques millions à la clé, comme on sort acheter un paquet de clopes.. Hein.. Alex ?..

     

    -    Humh.. hummh.. Fit ce dernier sans relever la tête.

     

    -    On est liés maintenant.. Compte pas te tirer avec le fric pour toi tout seul, il va falloir se mettre d’accord sur des principes très clairs.. Tu saisis ?..

     

    Continua Nico à voix basse.

     

    -    Tu ferais mieux de laisser tomber Nico.. Alex va reprendre le bon chemin, et je vois pas comment les Chiens Electriques pourraient se passer de leur meilleur guitariste… Pas vrai ?..

     

    Un glapissement se fit entendre du côté de Matt. Et personne ne s’aventura à contredire Lola. Alex se disait qu’elle avait fait griller des étincelles dans la peau de Nico. Dorénavant il filerait comme un caniche et avec lui elle mettait la main sur tout le groupe.

     

    -     L’ennui c’est que j’en sais rien de plus pour le fric.. C’ est une affaire insoluble les gars..

     

    -     C’est ce qu’on dit.. C’est ce qu’on dit toujours.. Mais il reste pas tellement de solutions.. T’es le seul qui peut éclairer ce mystère, alors il est pas question de t’oublier.. On va bien finir par se comprendre.. Tu crois pas ?..

     

     

    ,,,,,,,,,,,,…………………...

     

     

     

    Alex eut du mal à admettre ce qui lui arrivait. L'effet de surprise était total. Ils s’apprêtaient à quitter le snack où montait l’odeur de friture en vue du repas de midi, quand il sentit un regard insistant peser sur lui. Il chercha l’auteur de ce regard et l’aperçut à l’extrémité du bar, accoudé au comptoir. C’était une silhouette baraquée au profil taillé dans le marbre. Une face de Pierre.. Il eut aussitôt la certitude d’avoir déjà rencontré ce type. Un malaise l’envahissait, suivi d’une volonté irritante de se souvenir. Et plus il y pensait, plus le malaise l’agaçait. Il eut l’intuition que ce n’était pas le moment de filer. Il lui fallait d’abord résoudre cette question qui lui tordait les doigts de pieds. Heureusement l’homme se tourna franchement et un éclair le traversa en reconnaissant l’officier Léonardo.

     

    Le flic habillé en civil avait une toute autre allure. Presque celle d’un voyou, ou d’un videur de discothèque. Il portait un jean et un blouson de cuir que ses épaules tendaient à l’horizontale comme un cintre de bois. Puis Le flic fixa la porte des toilettes en lui balançant un clin d’œil. Le malaise en lui prit mille formes allant de la panique au soulagement. Mais de toute façon il lui fallait agir vite. Nico et les autres commençaient déjà à se lever et il s’écria qu’il avait une soif d’enfer.

     

    -    Je boirais bien une petite bière.. il ajouta.

     

    -    Ouaih.. pourquoi pas ?..  On est pas à la pièce.. Fit Nico en faisant signe à la serveuse qui dodelinait du bassin.

     

    -    Cinq.. Il montra de sa main.

     

    Alex avala sa bière presque d’un trait.

     

    -    Je vais aux chiottes.. Il fit avant de se lever.

     

    -    T’as pas besoin qu’on t’accompagne ?.. Ironisa Matt en se poussant.

     

    -     Non, je sais faire tout seul.. Lui répondit Alex sans sourciller.

     

     

     

     

     


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    Alex avait insisté pour qu'on lui laisse le temps d'une toilette complète. Cheveux, barbe, ongles, tout y était passé. Nico les rejoignit peu après, et il put constater les dégâts laissés par Jeff sur les uns et les autres. Le nez de Bœuf était recouvert de sparadrap, et Matt se tamponnait régulièrement son œil malade avec des mouchoirs humides. Les nerfs de Kim semblaient toujours à vif, quand à Nico, il claudiquait parfois avec une cheville devenue traître. La bande d’éclopés l’entoura comme aux plus beaux jours du groupe, et augmentée de Lola qui commençait à se prendre au sérieux dans son rôle de chanteuse bombe sexuelle, ils se dirigèrent vers un snack à proximité. Alex remarqua les bosses que les armes faisaient sous les blousons, et comment aussi les types bombaient le torse dans la rue.

     

    - Le plus fou maintenant c’est qu’ils ont l’air d’aimer ça… c'est des durs pour de vrai… Ils songea.

     

    - Mais tu pourrais aussi te tirer… Ils auraient beaucoup de mal à te retenir en plein jour, même que ce serait un délit qui pourrait leur coûter cher.. Et Curieusement Tu te Tires Pas.. Alors que ça serait si simple de te mettre à courir.. Il y a du monde autour, mais pas trop, juste ce qu’il faut.. Et pour aller où au fait ?.. Personne ne t’attend, nulle part ;. T’as pas grand chose en poche.. et puis ici il y a cette gonzesse qui te chauffe avec des œillades à mourir.. Ah si tu pouvais au moins savoir ce qui est arrivé aux billets, tu les mettrais à genoux.. Voilà la seule manière d’en finir avec les Chiens Electriques.. Ouaih t’hésites.. C’est confus ;. Confus ;. Vraiment confus depuis qu’ils t’ont lourdé du bus..

     

    Ils prirent place en silence autour d’une longue table métallique, et il se retrouva coincé au fond, ce qui lui laissait juste de quoi poser les coudes. IL les voyait jouer aux durs et s’en attristait.

     

    - Je me demande en définitive si j’aurais tenu six mois de plus avec ces types ;. Sans même parler du bus et de tout ce qui a suivi..

     

    Il rumina l’idée qui venait de le frapper en observant le néon rose et noir au dessus du bar. Il brillait en permanence sur le mur gris et ce n’était rien de plus qu‘une marque de bière.

     

    - En sortant d’ici je prend mes jambes à mon cou et salut les gars..; Non.. Il faut d’abord que je ramasse ma Fender et mes fringues ;. Mais avant la nuit je suis dans le train, c’est sûr.. J’aimerais savoir s’il existe un Saint pour les guitaristes, s’il pouvait me faire un petit signe.. Rien qu’une fois ;. Je lui en serais éternellement reconnaissant.. Allez .. rien qu’une fois..

     

    .

     


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    - J’aurais besoin d’un petit café.. Au réveil c’est primordial chez moi ;. 

     

    Lola ricana et Kim s’empressait d’en faire autant.

     

    - Mince.. Pensa soudain Alex.. J’ai le sentiment que c’est elle maintenant qui dirige la bande.. qui l’aurait prédit il y a seulement quelques jours.. Mon gars, il y a un tas de trucs sur les femmes qui t’échapperont toujours.. et t’as pas fini d’en baver…

     

    - Tiens.. Pour te montrer qu’on est pas rancunier, on va te l’offrir ton café brûlant.. Plutôt même deux si tu veux.. accompagnés de petits pains, et aussi de la confiture d’orange.. Je me suis laissé dire comme c’est sacré pour toi.. Et si après ça t’as encore un doute sur ma moralité, c’est que t’es le dernier des ingrats.. Pas vrai ?..

     

    Alex se décida à lever les yeux, et vit Lola qui le fixait enrobée de vapeurs. Il comprit qu’elle lui parlait de choses secrètes, que rien n’était fini entre eux. Ils restaient mariés avec la bénédiction éternelle du magot. Ils naviguaient toujours ensemble, ce qui dans la logique de Lola pouvait très vite se mesurer par certains privilèges.

     

    - Le vrai casse-tête avec cette garce, c’est qu’elle est parfaitement capable de te faire mourir de joie… ou d’une balle en pleine tempe, selon son humeur et ce qui l'arrange… Et si je savais au moins où se planquent ces satanés billets.. Rien que pour éteindre ma curiosité je pourrais sacrifier dix années de ma vie ;..  à croire qu’ils se sont volatilisés par magie.. D’abord je suis certain que Jeff les a pas.. Mais alors qui ?.. Et au fait, qu’est-il devenu ?.. C’est marrant je commençais à m’y faire à ce type, juste avant qu’il s’en prenne une dans le buffet..

     

    Alex ruminait gravement l’énigme, ce que soupçonna Lola quand il releva les yeux.

     

    - Jeff s’est évanoui dans la nature ;. Pffuuit.. malgré le plomb dans l’aile qu’il s’est pris ;. Si c’est ça qui te travaille.. Dis toi plutôt que je le connais bien ce type.. comme les chats.. neuf vies, il a de la marge quoi !.. à moins qu’il agonise dans un trou, on sait jamais avec lui.. De toute manière il ira pas loin, son avenir est limité avec tous les poulets qui lui cavalent au train.. C’est plus une affaire… Je prie pour lui, énormément, si tu mets en cause mes sentiments.. Mais le mieux serait qu’il meure en paix, je te l’dis.. Il a plus d’avenir…

     

    Lola tira une longue bouffée, avant de renvoyer la fumée en petites giclées. Son visage n’exprimait pas la gravité qu’elle prétendait ressentir. Alex continua de l’observer, pesant ses paroles et y trouvant une matière fascinante. S'en amusant comme on juge un numéro d’acteur.

     

    - Peut-être qu’elle possède une glande à part dans le cerveau.. Il finit par conclure.. Qui injecte directement le venin dans le sang.. Une sorte de seringue ou un truc du genre…

     

    - En tout cas t’as une information capitale.. Elle SAIT que Jeff n’a pas le fric, et il ne resterait plus qu’elle sur la liste.. A croire qu’elle nous mène tous en bateau..

     

    Il remua la tête.

     

    - A bien réfléchir c’est une hypothèse qui ne tient pas non plus, et elle ne l’a pas.. Seulement dans ce cas, c’est elle du coup qui s’ imagine que c’est TOI le petit malin de l’histoire..

     

    Soupirant une nouvelle fois.

     

    - Alors fais gaffe surtout ;. Elle va pas te rater…

     

    Il remarqua à cet instant qu’elle portait sa jupe noire particulièrement ajustée, et au bout des cuisses bombées comme des fusées, il aperçut le slip brillant, tout aussi noir. Une chaleur l’envahissait.

     

     

     

     


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    - On croit toujours que ça va se passer autrement..

     

    C’avait été la dernière pensée d’Alex accroupi dans un coin de la chambre avant de s’endormir en chien de fusil.

     

    Mais le fusil c’est Matt qui le tenait, bien en ligne sur ses genoux. Assis sur une chaise de l’autre côté du lit. La face blafarde autour de l’œil gauche qui hésitait entre le rouge sombre et le carrément bleu.

     

    Quand toute l’équipe avait cavalé dans les couloirs de l’hôtel, quelques nez s’étaient pointés dans les embrasures de portes. La plupart de ces types étaient des ouvriers bossant sur des chantiers et l’heure d’y aller approchait. Les portes se refermaient rapidement. Ces gens estimant qu'un pareil remue ménage ne les concernait pas. Le chauffeur du bus tenta un come back, mais cette fois la seule mine de Nico suffit à le renvoyer  au lit. Tout semblait comme par miracle vouloir retomber dans les limbes de la nuit.

     

    Il n’y eut pas plus d’animation dans le terrain vague et ses alentours. Comme si à notre époque on pouvait s'occire à bout portant en comptant sur le fait que chacun se mêle enfin de ses seules affaires.

     

    Alex qui avait un moment tablé sur une intervention extérieure pour le sortir du pétrin finit pas s’assoupir. C’était la dernière tranche de la nuit, la meilleure et la plus tranquille. Il en avait oublié sa stupeur quand dans les dernières marches du troisième étage, il s’était retrouvé devant Lola. Debout les jambes écartées en spectre érotique. Elle ne prit même pas la peine d’ouvrir la bouche. Ses yeux ressemblaient à des billes noires et il savait ce que ça signifiait. D’autant qu’elle tenait un flingue en main et le visait en plein cœur.

     

    - Je viens chercher ma guitare et mes fringues ;. Il avait néanmoins tenté.

     

    - T’as raison.. c’est justement ici que ça se passe.. Elle répliqua vicieusement.

     

    Il s’exécuta sans un mot. Juste avant et pour la première fois de sa vie il avait pensé abandonner la Fender. Il ne demandait qu’à filer et le plus loin possible. Seulement les billets de Boyarkan se trouvaient dans sa veste. Encore ce damné grain de sable qui ne manque jamais au pire moment.

     

    ;;;;;;……..

     

    Alex fut tiré de son sommeil par une main qui le secouait sans ménagement. Il grogna en levant ses bras comme pour se défendre.

     

    - Allez réveille toi ;. Tu vas pas pioncer toute la journée..

     

    Il ouvrit péniblement les yeux en reconnaissant le voix de Kim. Il lui fallut encore plusieurs secondes pour voir ses idées se remettre en place.

     

    - C’est bon j’arrive.. Il fit en se frottant les yeux emplis de graisse jaune.

     

    - Se lever aux aurores n’a jamais été leur genre.. Il songeait.

     

    - Ce fric leur tape complètement sur le système.. Je me demande ce qu’il leur prend ;.

     

    Il entrevoyait une journée trop longue. Surtout si elle débutait de cette façon et aussi tôt. Alors seulement il aperçut Lola nonchalamment posée au bout du lit. La pièce était pénétrée d’une lueur pâle et encore brunie par la décoration lamentable.

     

    - On se faisait du souci.. Tu semblais parti pour l’éternité.. Elle lui murmura en se payant ouvertement sa tête.

     

    Elle aspira une bouffée de cigarette dont l’odeur le révulsa. Il n’avait rien avalé depuis au moins vingt heures.

     

    - J’aurais voulu que ça se passe autrement.. m’envoler le plus loin possible.. Gémit Alex.

     

    Il ne se découvrait aucune peur. Mais ressentait une lassitude pour ces courses poursuites, et des péripéties qui revenaient sans cesse à leur point de départ. Le fric, les cuisses magnifiques de Lola. L’épopée ratée d’un groupe de Rock-and- Roll qui avait perdu la boule. C’était comme un disque rayé sur un vieux Teppaz. La surboum était finie, les lumières éteintes, et personne s’était rendu compte de rien. Le disque tournait et grattait inlassablement dans l’obscurité du garage.

     

    - Euh.. euh.. T’es pas le seul à y penser, Beau Gosse... On aimerait tous que ça se termine vite ;. Et plutôt à l’amiable.. Suffit que tu lâches le morceau et on en parle plus.. Et t’as pas oublié tout de même que là dedans il y a ta part.. Cent mille ;; ça aide à remonter dans sa propre estime.. C’est pas vrai ?..

     

    Alex pensa que le réveil manquait de poésie. -  La réalité déçoit toujours. Il songea tristement. 

     

     

     

     


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    L’excursion prenait des allures fantomatiques, et les deux Prisonniers.. s’adossaient mollement sur l’aile d’un break sur cales. Kim à cet instant farfouillait dans le coffre du coupé vert à l’aide d’un briquet.

     

    - Y a pas plus ici qu’ailleurs ;. Il lâcha dépité.

     

    - C’est pas grave, on va s’expliquer entre hommes.. Le pognon s'est pas mis à courir tout seul, c’est pas vrai le rasé ?.. Minauda Nico à l’intention de Jeff.

     

    Lui son problème était de ne pas retourner les mains vides vers Lola. Ce que Jeff  renifla d’instinct.

     

    - Elle a dû lui faire goûter le paradis à ce trou du cul.. Il songea avec une certaine nostalgie.

     

    Dans son dos Boeuf grommela à un signe de Nico. Il fit un pas vers Jeff et le retournant d’un geste lui balança un crochet au menton.

     

    - Hannh.. Entendit-on dans la nuit, suivi d’un bruit sourd de tôle. Jeff venait de voler le long du break.

     

    - Rageusement Nico se tourna vers Alex.

     

    - Et toi te fais pas d’illusions, on t’as pas oublié.. Si t’as quelque chose à dire, c'est le moment.. Sinon y a des chances pour qu’on trouve une combine qui fera conclure à un beau règlement de comptes entre deux voyous.. Envoie vite le fric.. Ca vaut mieux..

     

    - Moi je crois que tu vois trop de films Nico ;. Et ça te réussit pas..

     

    - Laisse moi m’en occuper frangin.. C’est depuis un moment qu’il me fatigue celui-là ;..

     

    - Matt à son tour s’avançait et d’un coup rapide cueillait Alex au ventre, le faisant se plier à angle droit sans lui arracher un gémissement.

     

    - Merde.. T’avais jamais imaginé que la musique pouvait déboucher sur des trucs aussi dingues.. Et dire que t’auras peut-être même pas l’occasion d’en tirer une bonne chanson.. Personne voudra croire une histoire pareille.. Personne.. ;  Pensa Alex en tentant de repousser la douleur.

     

    Il parvint à se redresser, et devant lui des silhouettes s’excitaient et trépignaient comme des dératés.

     

    - Vous avez tord les gars, je comprend que ça ressemble à un mystère pour le fric.. Mais je crois qu’il y a un autre larron dans l’affaire.. Il fit en essayant de retrouver son souffle.

     

    - Vous parlez pas à des ânes les comiques.. le mystère est très simple.. Il y en a un de vous deux qui doit cracher la vérité ;. Ou je m’appelle plus Nico… et vous risquez de finir en miettes avant longtemps.. Oubliez pas que tirer sur un braqueur et son acolyte.. Ca s’appelle de la Légitime Défense…

     

    - Laisse moi terminer le boulot Nico… J’aime pas qu’on se fiche de ma tronche..

     

     Adoptant la posture du costaud de la bande Bœuf leva un de ses gros poings.

     

    Nico ricana.

     

    - Ouaih.. c’est vraiment triste d’en arriver là.. Quand on presse un citron il en sort du jus en principe ;. Faut voir si c’est pareil avec les billets de banque.. On va pas décevoir Lola tout de même.. A toi bœuf..

     

    - Maintenant ils se prennent vraiment pour des caïds ;. C’est une histoire de fous.. Fit Alex sans réaliser qu’il parlait à haute voix.

     

    Bœuf s’avança et Alex crut bon de se protéger des deux bras. Mais le batteur avait une autre cible en tête. Nettement plus à son goût. C’était un vrai bulldozer avec ses dents scintillantes dans l’obscurité. Il déboula ainsi sur Jeff, commettant sa première erreur. Le genou de Jeff sembla jaillir de nulle part. Son buste n’ayant pas bougé d’un poil. Mais le genou percuta là où ça avait été décidé, en plein dans les parties du batteur. Un son horrible salua l’impact et Bœuf pliait sur ses jambes.

     

    - Bâtard.. Cria Nico, en cherchant à atteindre Jeff. Seulement il trébucha sur Bœuf et manqua de s’étaler. Jeff qui sans perdre de temps redressait le gros par les cheveux pour lui asséner un coup de boule. Après quoi il l’envoyait voler devant lui. Un flot de sang jaillit du nez éclaté et presque aussitôt un coup de feu déchirait la nuit. Nico venait d’appuyer sur la détente en se prenant Bœuf de plein fouet. La balle était partie dans le vide. Les uns et les autres peu habitués aux armes en avaient les tympans cassés. Matt s’était jeté sur le côté.  Avec l’idée de balancer une rafale qui aurait pu massacrer tout le monde. La tentative heureusement se terminait par un simple juron.

     

    - Salope.. Il fit en rageant contre le cran de sûreté.

     

    Nico était aux prises avec le poids de Bœuf qui le coinçait contre une portière. Aspergé de sang il finit par croire qu’il était lui même blessé et se mit à rugir. C'était la confusion. Seul Jeff conservait toute sa lucidité. Il se détendit vers Matt et lui défonça le plexus du talon. Avant de martyriser son orbite d’un bon direct. Le pistolet mitrailleur partit dans la mêlée. Kim avait reculé comme foudroyé par tout ce qui se passait. L’automatique chromé pendait misérablement à sa main. Nico venait de se dégager et braquait le canons sciés en direction de Jeff. Ses jambes maigres dans le pantalon blanc dessinaient un arc au dessus du sol. Mais Jeff l’avait senti venir et effectuait un roulé boulé. En moins de deux il était à l’abri d’une roue, et à sa main se découpait la forme grise du pistolet mitrailleur ramassé au sol. Un éclair surgit du canons sciés et la vitre du break vola en poussières. Alors Jeff se releva comme un diable prêt à tout arroser devant lui. Quand une troisième détonation retentit dans son dos.

     

    - La vache.. Il hurla en s’affaissant.

     

    - Putain les mecs ;. Je l’ai eu.. je l’ai eu.. Je vous jure que je l'ai eu..; Entendait-on crier dans l’écho qui se dissipait lentement comme un brouillard.

     

    C’était Kim qui exultait, n’en revenant pas lui même.

     

    - Ta gueule.. S’écria Nico d’une voix étranglée.

     

    - Faut qu’on dégage.. Vite les gars on se tire d’ici.. Vite.. ;

     

    Il était complètement paniqué, les joues ruisselantes d’une sueur épaisse, la face aussi blanche que sa tenue. Il n’eut que le réflexe d’attraper son frère par une manche pour le traîner au loin. Bœuf les suivait en claudiquant. Kim contourna Jeff en effectuant des sauts de cabri comme s’il voulait fêter l’événement. Plus personne ne pensait à Alex qui avait fondu dans la nuit dès le début des hostilités. Deux fenêtres venaient de s’éclairer à l’arrière d’un immeuble, et juste après ils s’engouffraient dans le hall de l’hôtel toujours désert. Ils montèrent les étages raides en sueur, et c’est en haut qu’une voix glaciale les cueillait. Une voix de femme.

     

    - Tas de crétins.. Fit Lola.

     

    - Planquez vous avant l’arrivée des flics ;. On sait jamais ce qui va arriver, et n’oubliez pas celui-là.. Elle fit sans se départir de son calme glacé.

     

    - Alors seulement ils avisèrent le revolver dans ses mains, et dans un angle Alex qui les observait d’un air dubitatif.

     

     


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